Thomas Pesquet, astronaute de l’Agence spatiale européenne (ESA), ancien commandant de la Station spatiale internationale, auteur de La Terre entre nos mains (Flammarion), est l'invité du Grand entretien de France Inter.

Thomas Pesquet, astronaute de l’Agence spatiale européenne (ESA), ancien commandant de la Station spatiale internationale, a passé 200 jours dans l'espace l'an dernier. Près d'un an après son retour sur Terre, il publie ce mercredi le livre de photos La Terre entre nos mains (Flammarion), dont les droits seront reversés aux Restos du cœur. Dans cet ouvrage, on admire les photos de la terre, mais on constate également les traces du dégèlement climatique.
Des photos de "la beauté" de la Terre et de "sa fragilité"
Thomas Pesquet a pris 245.000 photos lorsqu'il était dans l'espace. "La photo ne fait pas partie du programme de la mission, on le fait le soir, le week-end, le dimanche. Beaucoup de photos étaient prises en mode automatique. C'était à peu près mon seul loisir", explique l'astronaute. Il a fait la majorité du tri à bord, avant de retourner dans cette base de donnée pour publier ce livre de photos.
Quelles photos l'ont le plus marqué ? "Il y en a plusieurs, aussi bien du côté de la beauté de la Terre que de sa fragilité. C'est un peu l'aller-retour permanent dans ce livre-là, ce qu'on a voulu faire." Il se souvient notamment des "aurores boréales",qu'il n'avait pas pu voir pendant sa première mission. Il y a cette beauté, mais également "la finitude". "Là, "c'est vraiment le choc de la mission spatiale, le recul de se mettre dans l'espace permet de se rendre compte qu'on a un bout de la Terre à gauche, l'autre à droite, que tout ce qu'on a se trouve ici, on a la chance d'avoir cet environnement très propice à la vie humaine", détaille Thomas Pesquet. "On réalise que c'est fini, qu'on a toutes les ressources à bord du navire, que la Terre est un grand navire et qu'il faut s'en occuper".
Avec, au fil des photos et de la mission, "une certaines inquiétude". "Au début, vraiment, le cheminement c'est de se dire 'la Terre c'est magnifique' avec les couleurs, les formes, puis de plus en plus on a le regard attiré par les endroits où on voit que ça ne se passe peut-être pas si bien que ça." "De voir la pollution marine, la déforestation, la fonte des glaciers", c'est également ce qu'il a voulu capturer et transmettre à travers ce livre.
Témoin des immenses incendies aux Etats-Unis
Dans ce livre, on voit notamment une photo sur un double page, au dessus des Etats-Unis, avec en légende "Parc national en proie aux flammes, été 2021". On y voit le Parc national de Sequoia en proie aux flammes, et Thomas Pesquet raconte*, "pour la première fois je vois des flammes"*. "Malheureusement, je pensais que ça allait être une exception, mais il se trouve qu'apparemment tous les été, le scénario se répète", déplore l'astronaute. "Là, c'était des feux d'une ampleur incroyable. On a vu la Californie entière recouverte d'un nuage de fumée."
Dans le livre, d'autres photos témoignent, elles, des incendies qui ont ravagé certaines régions des pays européens. "On a tous assistés à ça avec inquiétude, parfois on avait des proches, comme la famille de Megan, ma collègue américaine, qui avait de la famille en Californie". "Nous, ce qu'on peut faire, c'est d'en témoigner", poursuit Thomas Pesquet qui rappelle le rôle de la station spatiale, qui peut aider les secours sur place pendant une crise, comme un incendie, en envoyant ses photos.
Interrogé sur les fausses informations qui peuvent circuler, affirmant par exemple que l'Homme n'est jamais allé sur la Lune (une vidéo de son interview avait notamment été détournée), Thomas Pesquet réagit : "Je ne suis pas certain que le discours scientifique soit plus remis en cause, mais ce qui est certain c'est qu'on en entend beaucoup plus parler (...) il faut s'en occuper, on a une responsabilité." "C'est à nous de faire le travail, d'expliquer aux gens, de faire de la pédagogie. Il faut s'adresser aux plus jeunes pour leur donner les armes, pour qu'ils reconnaissent une information visiblement fausse sur Internet d'une information qui a l'air plus étayée", ajoute-t-il, précisant que "c'est un petit peu mon combat aussi".
Enfin, à propos de la station spatiale chinoise, Thomas Pesquet assure qu'il y a "une démarche géopolitique des Chinois, ils veulent montrer au monde qu'il savent faire. Et ils y arrivent très très bien, c'est impressionnant ce qu'ils font dans l'espace". Quelle suite pour lui et les autres astronautes français ? Marcheront ils un jour sur la Lune ou sur Mars ? 'Oui, on fait plus que l'espérer, on y travaille tous les jours."